Gazette Drouot logo print

La dame au jasmin, le portrait d'une jeune aristocrate par Nicolas de Largilliere

Publié le , par Philippe Dufour
Vente le 23 mai 2024 - 14:00 (CEST) - Hôtel des ventes du Marais, 62, rue des Docteurs-Muller - 42000 Saint-Étienne
Cet article vous est offert par la rédaction de la Gazette

Issu d’une grande collection régionale, ce tableau, d’une majesté très louis-quatorzienne, est l’occasion de se pencher sur l’art théâtral du portraitiste virtuose.

Nicolas de Largillierre (1656-1746), Portrait de Catherine Begon de Montfermeil,... La dame au jasmin, le portrait d'une jeune aristocrate par Nicolas de Largilliere
Nicolas de Largillierre (1656-1746), Portrait de Catherine Begon de Montfermeil, née Guymont, 1695, toile, signé et daté «Largi- / llierre / 16 / 95», 137 96,5 cm (détail).
Estimation : 80 000 € /100 000 

Dans un décor suggérant une terrasse surmontée d’un ciel orageux, le portrait de Catherine Begon de Montfermeil, née Guymont, par Nicolas de Largillierre, nous entraîne dans la très haute société de la fin du XVIIe siècle. La grande dame (1666-1754) est la fille d’Hervé Guymont (1632-1711), seigneur de La Mahitière, maréchal des logis de la Maison du roi ; elle a épousé en 1684, Michel Begon, dit le Jeune (1655-1728), seigneur de Montfermeil. Ce dernier a amassé une fortune considérable, que la somptuosité du costume arboré sur notre toile de 1695 confirme sans appel. Il finira cependant par se ruiner, un aléa peut-être à l’origine de la décision de son épouse de se séparer de lui, en 1702… Pour l’instant, la jeune aristocrate, au faîte de sa jeunesse et de sa beauté, prend la pose devant Largillierre à la manière d’une comédienne du Français. Elle a revêtu une spectaculaire robe en velours bleu, rehaussée de larges broderies d’or constellées de perles. Quant aux bordures ornées de motifs de pagodes, elles ont peut-être été inspirées par la visite de l’ambassadeur du Siam à Versailles, en 1686. Incontournable à cette époque, la figure du petit page noir apporte une touche exotique à l’œuvre, en même temps qu’elle met en valeur la pâleur du modèle. Enfin, en représentant la jeune femme cueillant une branche de jasmin, symbole de sensualité, l’artiste semble lui attribuer une personnalité voluptueuse.

L’artiste favori de la noblesse et de la haute bourgeoisie parisiennes s’attache alors à peindre une image quelque peu idéalisée de la femme en lissant son aspect psychologique.


Beautés des années 1690

Olympienne, la figure de Catherine Begon de Montfermeil s’inscrit parfaitement dans la série des portraits féminins livrés par Nicolas de Largilliere au cours de la décennie 1690. L’artiste favori de la noblesse et de la haute bourgeoisie parisiennes s’attache alors à peindre une image quelque peu idéalisée de la femme en lissant son aspect psychologique. En revanche, sa clientèle de qualité sera plus sensible à son traitement virtuose des étoffes précieuses, crissantes de vérité, et qui situe immédiatement le modèle dans l’échelle sociale… Notre composition peut donc être rapprochée de plusieurs grands tableaux de Largillierre peints autour de 1695. On retrouve ainsi la figure du page – cette fois portant une corbeille de fleurs et non de fruits –, sur un Portrait de femme avec une couronne florale de la même période, conservé au Honolulu Museum of Art. Cet enfant réapparaît dans un autre et important Portrait de femme, celle-ci accompagnée d’un perroquet et d’un chien, daté de 1696, aujourd’hui au Metropolitan Museum of Art de New York. Incarnation parfaite de la beauté louis-quatorzienne, Catherine Begon de Montfermeil a eu les honneurs de manifestations prestigieuses, telle l’Exposition universelle de Paris en 1878, au palais du Trocadéro. Ou encore l’accrochage au château de Versailles en 1966, avec un ensemble de portraits de dames de la cour du Roi-Soleil. La toile majestueuse y apparaissait d’ailleurs sous le titre de Mademoiselle de Nantes (l’une des filles légitimées du roi et de madame de Montespan). Précisons enfin que notre tableau sera inclus dans le catalogue raisonné de l’artiste que prépare actuellement Dominique Brême, spécialiste du maître.

Lire les articles liés à la vente