GIBRAT Lot n° 3

JEAN-PIERRE GIBRAT LE VOL DU CORBEAU, Dupuis Un portrait au vol, illustration originale réalisée en 2023 Signée. Aquarelle et encres acryliques sur papier 76,5 × 50,3 cm (30,12 × 19,8 in.) Un boulevard parisien, une terrasse. N'en demandez pas davantage à Jean-Pierre Gibrat : « J'ignore l'endroit précis où j'ai campé cette scène. À Paris, les grandes artères et leurs cafés ont un dénominateur commun, qui est leur charme. » Mais le caractère unique de cette illustration tient à l'oeil du portraitiste. Regardez la façon dont le sujet se détache de l'arrière-plan, comme saisi par un Leica équipé d'une focale courte. Et le cadrage de Jeanne - béret et coude à la coupe - montre la rapidité avec laquelle l'instantané a été pris, avec un souci minimum du cadrage. Et pourtant, la jeune femme prend le temps de sourire à l'artiste quand les consommateurs de la terrasse, derrière elle, ne remarquent rien. « Bien avant la photo de rue rapide et le fameux "instant décisif" célébré par Henri Cartier-Bresson, les peintres avaient imaginé le même procédé hyper-dynamique », commente Jean-Pierre Gibrat. « Je me souviens d'une toile, je crois de Gustave Caillebotte, où un chien va sortir de l'image. » Dans cette grande illustration, une seule image, sans parole. Ce qui n'empêche pas Gibrat de nous donner à voir ses talents de narrateur. C'est Jeanne, personnage emblématique du Vol du corbeau, qui nous attire dans une lecture de la scène de la gauche vers la droite. Gibrat agit ici en metteur en scène de cinéma avec un plan séquence qui nous entraîne dans la profondeur de l'image par rebonds de regard en regard. Car l'originalité de cette illustration, au delà de sa virtuosité plastique, c'est le fil invisible que l'auteur tisse entre les différents personnages. Et ce fil qui se déroule au rythme de la succession des regards devient une ligne mélodique. Ici, Gibrat se pose en chef d'orchestre de l'espace et du temps en nous composant pour notre plus grand plaisir une mélodie pleine de chaleur, de tendresse et de convivialité. Gaétan Nocq